Claude Gross, un entraineur qui gagne

Il est comme ça, Claude Gross, capable de prendre ses filles dans ses bras et de leur parler tout en douceur, quelques secondes à peine après avoir tout dit, et même un peu plus, à un quatrième arbitre ou un juge de touche. Un homme franc, qui n’a pas peur de s’engueuler avec tout le monde et de se faire des ennemis. On l’a expérimenté de près, ces dernières années, lorsqu’une ligne, un paragraphe ou un article n’étaient pas forcément en accord avec sa pensée. Avec lui, pas de « on-dit » par derrière, pas de paroles qui reviennent aux oreilles quelques semaines après. Non. Claude Gross, lui, dit les choses. Lorsqu’on oublie de parler du Mont pendant que les articles sur le Lausanne-Sport se multiplient, il ne se prive pas de le faire remarquer. « On ne joue plus dans la même ligue? J’ai raté quelque chose? », nous a-t-il déjà apostrophé, alors qu’on tentait de se défendre en argumentant sur le fait que le LS jouait la promotion et Le Mont plus rien. Rien à faire, ce sentiment d’injustice, cette rage interne, ce « seul-contre-tous » est l’un des moteurs qui animent Claude Gross.

Il lit tout, voit tout et sait tout, mais n’en laisse rien paraître

On se souviendra toujours de notre première rencontre avec lui. On avait déjà écrit quelques articles sur le FC Le Mont, quelques semaines avant la montée du club en Promotion League. C’était en 2013 et on avait parlé avec son président, ses joueurs, mais pas avec lui. Pas encore. Alors, quand on l’a croisé, un peu par hasard, sa première phrase a été: « Vous avez un problème avec moi? ». On a souri, parce qu’on s’y attendait, au fond. Oui, cet entraîneur ultra-passionné est surtout un ultra-sensible, un homme qui lit tout, voit tout, sait tout, mais n’en laisse rien paraître.

Une année de folie, littéralement à 300%

Cette année, il a travaillé à 100% à la Commune de Chexbres, a suivi les cours pour son diplôme UEFA, avec les voyages qui vont avec, tout en entraînant une équipe de Challenge League et en assumant son rôle de père de famille. Une folie, qu’il a complètement assumée, se donnant à fond dans chaque rôle. Ainsi, un samedi, on l’a appelé, on ne sait plus pourquoi. Ce dont on se rappelle très bien, par contre, c’est qu’il était devant son ordinateur, en train de regarder Wohlen-Schaffhouse en prenant des notes. Il n’a jamais supporté que l’on dise qu’il n’était pas un entraîneur professionnel. Il était un entraîneur professionnel avec un boulot à côté, voilà tout.

N’importe qui aurait pu y arriver? C’est faux

Claude Gross, il faut le dire et le souligner, a amené Le Mont en Challenge League sans commettre aucun écart. Il est trop facile de dire qu’il avait la meilleure équipe de 1re ligue, puis la meilleure de Promotion League, et que n’importe qui aurait pu y arriver. C’est faux, tout simplement. Il a su gérer les équilibres dans son équipe, il a su trouver les tactiques adaptées, tout en gardant son autorité et en renouvelant le vestiaire. Bien sûr, il pouvait être dur, voire froid, avec ses joueurs, avec lesquels il gardait une certaine distance, mais cette façon de faire était la bonne, dans ce contexte. Un entraîneur trop gentil, trop lisse, se serait fait bouffer. Lui a tenu ses joueurs et a eu l’intelligence de les laisser s’exprimer, notamment en 1re ligue, ne demandant pas à Sid-Ahmed Bouziane, par exemple, de jouer contre-nature. Un reproche qui nous a toujours ulcéré, et que l’on a encore entendu ce week-end, est de dire que ses joueurs étaient en auto-gestion. Non, non et non. Claude Gross a simplement eu l’intelligence de ne pas vouloir se mettre en avant, mais les choix, c’est lui qui les faisait et un très bon entraîneur est celui qui s’adapte à ses joueurs, pas l’inverse.

Il a taclé sur tous les terrains du canton

Là est d’ailleurs la grande force de Claude Gross, qui en fait un entraîneur que l’on a toujours admiré: il gagne. D’un pragmatisme qui n’a aucun égal, il n’est pas un homme qui va complexifier le football, le rendant simple. Il est l’exact contraire de ces docteurs du football qui ont appris le football dans des livres et ne savent l’expliquer qu’à base de cours ASF, arrêtant chaque exercice sur le terrain pour expliquer, souvent mal, comment tel ou tel joueur devrait être placé. Il n’a pas le passé de joueur d’Admir Smajic ou de Ciriaco Sforza, mais il comprend le football et sait d’où il vient, lui qui a taclé sur tous les terrains du canton, de Bussigny à Orbe en passant par Donneloye et le FC Vignoble. Il connaît le football des talus, Claude Gross, et il n’a pas appris le football assis à une table d’étudiant, les pieds bien au chaud. Lui a mouillé ses chaussures sur les terrains et a nettoyé ses crampons au jet avant d’aller boire une bière à la buvette, une habitude qu’il a gardée sur les terrains de Challenge League, d’ailleurs, avant de prendre le bus pour rentrer à Lausanne.

Il a progressé en même temps que son club

Il est ainsi bien au Mont, ce club ambitieux, mais à taille humaine, ce qui ne l’empêche pas d’avoir su élever son niveau pour évoluer dans le monde professionnel. Claude Gross a accompagné ce mouvement, progressant chaque semaine dans son management, sans se trahir, et allant chercher le plus haut diplôme disponible, l’UEFA-Pro, ce qu’il a toujours considéré comme un défi personnel, une manière de se prouver qu’il pouvait y arriver, lui le footballeur venu de la base. Au long de ces deux années de Challenge League, il a su adapter ses tactiques, trouver des solutions et effectuer des choix forts, comme ceux de sortir Daniel Gygax, cette saison, ou Johnny Leoni, la saison dernière. Lui, le joueur amateur, qui n’a pas foulé les pelouses de LNA, a dû expliquer à des internationaux suisses que leur place était sur le banc. Alors oui, il s’est fait des ennemis, mais il l’a toujours assumé: il n’est pas dans le football pour se faire des amis.

Jamais un mot de travers, même sous le coup de la colère

Il y a les fidèles autour de lui, bien sûr, au premier rang desquels John Dragani, mais aussi ce président, ce Serge Duperret avec lequel les rapports ont été parfois explosifs. Mais même au pire moment, même lors de l’affaire de sa vraie-fausse démission à l’hiver 2014-2015, même quand son président l’a mis sous pression, il n’a jamais eu un mot de travers. Bien sûr, il a exprimé sa déception, en privé, quand son président allait parfois un peu loin dans la presse, mais jamais, on insiste, il n’a voulu lui répondre autrement qu’en face. De nouveau, Claude Gross est un homme franc, qui dit les choses devant son interlocuteur et pas dans les journaux. Un chef de clan, qui sait que les affaires sérieuses se règlent en famille.

Le « petit » qui vient bousculer les « grands », un rôle qu’il aime

Voilà aussi pourquoi il est si bien au Mont, un club qui ne déchaîne pas les passions et qui n’est pas tout le temps sous le feu des projecteurs. Bien sûr, il estime que la formidable aventure de ce club parti de la 3e ligue mériterait plus de monde au stade et plus d’articles dans les journaux, mais au fond, il se plaît bien dans ce rôle du « petit » venu embêter les « grands », lui qui aime bien mettre des guillemets aux deux et qui ne se prive jamais de souligner ce que le FC Le Mont et son « environnement d’amateurs » font de mieux que le LS et son « armée de professionnels »…

Fidèle à ses convictions jusqu’au bout

Un homme sensible et un homme juste, prêt à tout pour les siens et ceux qui ne l’ont jamais trahi. Un homme qui aime sa famille, son clan, et qui ne laisse personne approcher facilement dans ce cercle privé. Alors, forcément, quand on est aussi bien entouré, que le noyau est soudé, les attaques venues de l’extérieur glissent plus facilement. D’ici quelques jours, il ne sera plus l’entraîneur du FC Le Mont et il aura, enfin, un peu de temps pour souffler et tirer le bilan de ses années d’entraîneur. On ne sait pas ce qu’il va se dire, Claude Gross, mais on est sûr d’une chose: il sera resté fidèle à ses convictions jusqu’au bout. Et ça, ce n’est pas donné à tout le monde dans le milieu du football.

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