«Le Qatar, c’est vraiment un autre monde»

Vagner Gomes a aujourd’hui 33 ans, et est actuellement à la recherche d’une nouvelle aventure dans le football. Après avoir commencé la saison avec Yverdon Sport, comme entraîneur-assistant, l’arrivée de Vittorio Bevilacqua l’a poussé vers la sortie. Accompagnera-t-il Adrian Kunz, un ami et une excellente relation professionnelle, pour un défi avant la fin de la saison? Pas impossible. «Nous avons des contacts», commente-t-il sobrement, sans vouloir en dire plus. Rejouera-t-il encore, lui qui a porté les couleurs de LUC-Dorigny (2e ligue) la saison dernière? Pas sûr non plus. Pour l’heure, «Vagi» a accepté, pour nous, de revenir sur un épisode marquant de sa carrière, son passage au Qatar.

Ce petit pays du Golfe, grand par sa puissance financière, fait actuellement beaucoup parler de lui en raison de l’organisation de la Coupe du Monde 2022, qu’il a obtenue. Après deux éditions à venir dans des magnifiques pays passionnés de ballon rond et avec une riche histoire et culture footballistiques (Brésil 2014 et Russie 2018), le Mondial 2022 risque d’être un peu différent. Les sujets de discussion ne manquent pas: la chaleur en été, déjà, mais aussi les récents scandales liés à la mort de travailleurs étrangers sur les chantiers des futurs stades. Vagner Gomes n’est pas resté assez longtemps à Al Ahly, un des clubs de la capitale, Doha, pour avoir un avis définitif, mais sa vision est intéressante à plus d’un titre, étant l’un des seuls footballeurs suisses à y avoir joué, avec Hakan Yakin et Blaise Nkufo (qui a d’ailleurs été champion avec Al-Arabi Doha en 95/96).

Vagner Gomes, est-il possible de jouer au football en été au Qatar?

Sincèrement, c’est de la folie. La chaleur est insoutenable. Nous, on s’entraînait le matin. L’après-midi, c’est impossible de sortir, tout simplement. Je n’imagine pas un seul instant qu’on puisse organiser une Coupe du Monde en plein été au Qatar. Alors, oui, ils ont des moyens, les stades seront climatisés. Mais tout le reste? Les supporters, les entraînements, les déplacements?

Quand y êtes-vous allé?

J’y suis resté deux mois et demi, de février à avril 2004. Ce n’étaient pas les mois les plus chauds, mais c’était déjà compliqué. Certains jours, je voyais le ciel couvert, je me disais que c’était bon, que je pouvais sortir. Je faisais deux mètres et je dégoulinais de sueur. Je n’ose même pas imaginer en juillet.

Comment êtes-vous arrivé au Qatar ?

Je jouais au Lausanne-Sport lors de la faillite de 2003 et la relégation la première équipe en 2e inter. Un agent m’a contacté et m’a dit qu’il y aurait une ouverture pour moi là-bas. J’ai accepté d’aller passer des essais et j’y suis donc resté deux mois et demi. J’ai disputé la Coupe du Prince, où nous sommes allés jusqu’en finale. J’étais bien, j’ai marqué plusieurs buts, mais je n’ai pas décroché de contrat. Je voulais rester, mais il n’y avait que trois étrangers par équipe. C’est la règle du jeu, et ils ne font pas de sentiments. Quand je suis arrivé, il y avait Guardiola, un Cap-Verdien et un Brésilien. J’ai été bon tout de suite et ils ont dégagé le Brésilien pour me faire de la place. Excusez-moi du terme, mais c’est exactement ce qu’il s’est passé. Et à l’inverse, deux mois et demi plus tard, ils m’ont dégagé de la même manière. Je ne peux pas dire qu’ils n’ont pas été corrects, c’est comme ça.

Vous avez donc joué avec Pep Guardiola!

Oui, j’ai eu de la chance, j’ai pu jouer avec mon idole absolue. Le plus incroyable, c’est que je ne savais même pas qu’il était là-bas quand j’ai signé. Je suis arrivé et il était dans le même hôtel que moi. Il était tout seul, comme moi. On passait tout notre temps ensemble, on mangeait ensemble, on faisait trajet commun. C’était un vrai personnage. Je me rappelle, lors des déplacements, on prenait tous le bus et lui suivait dans un Range Rover, avec chauffeur bien sûr! Mais c’était quelqu’un de vraiment humble. Je parlais avec lui, comme je parle avec vous maintenant. Pourtant, je n’étais personne comparé à lui. C’est vraiment quelqu’un de simple.

Et sur le terrain?

On jouait les deux au milieu, c’était la classe. Je me rappelle un match, il a mis un coup-franc direct. Pleine lucarne. Chacun de ses gestes respirait la classe, je n’ai même pas besoin de le préciser.

Etes-vous resté en contact avec lui?

Non, pas du tout. De nouveau, je ne suis resté que deux mois et demi. Et après, on a eu des trajectoires différentes, c’est le moins que l’on puisse dire (sourire).

Parlez-nous un peu du football là-bas…

Ce qui m’a frappé, c’est que dans les stades, il n’y avait personne. Juste les propriétaires, en blanc. Sinon, c’était fou. Sur le terrain, tu avais Batistuta, Guardiola, Sonny Anderson, Leboeuf… et personne pour les regarder. Le niveau était celui d’une 2e ligue inter, sincèrement. Ce n’était vraiment pas terrible.

Et au niveau financier?

Disons que c’était spécial aussi (sourire). Après les matches, on passait dans un petit bureau, à côté du vestiaire, et on touchait l’argent en cash. Je n’avais jamais vu ça, j’hallucinais complètement. Je demande à Guardiola si c’est normal, il me sourit et me dit de ne pas m’en faire. Il avait une grosse liasse dans les mains, je lui demande si c’est sa prime. Il rigole et me dit que c’est un « acompte ». On ne devait pas avoir le même contrat (rires)!

Avez-vous bien gagné votre vie?

Oui. Pour les deux mois et demi que j’ai fait, je ne peux pas me plaindre. Ils ne m’ont pas tout payé, mais c’était correct quand même. Mais c’était un peu différent pour moi, puisque je ne suis resté que septante jours. Je voulais absolument décrocher un contrat, mais je n’y suis pas arrivé.

Et au niveau de l’attitude?

Disons que c’est très sec, comme management! Mais comme je vous l’ai dit, ils ont toujours été corrects. Franchement, je n’ai rien à dire là-dessus. Ils ne font pas de sentiments, mais je n’ai pas rencontré beaucoup de monde qui en faisait durant ma carrière professionnelle.

Y retourneriez-vous?

Franchement, c’est vraiment un autre monde. Mais pourquoi pas ? Bon, je n’aurai sans doute plus l’occasion, mais on ne sait jamais. Peut-être comme entraîneur? Mais il y a une chose à laquelle je n’arrivais pas à m’habituer: la nourriture. Il n’y avait pas de viande, même à l’hôtel. Qu’une sorte de couscous, je ne sais pas comment le définir. Pas de quoi nourrir un footballeur! Bon, les choses ont bien changé, j’en suis sûr. Le Qatar est un pays qui grandit et évolue vite, à tous les niveaux.

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