Malgré la relégation en 3e ligue de l’équipe fanion du FC Venoge, pas question pour Elio Da Mota de changer d’air, ni pour ses dirigeants de lui trouver un remplaçant. Portrait d’un homme qui a construit sa vie dans le club qu’il a rejoint il y a maintenant six ans.
Si Elio Da Mota était destiné à devenir l’entraîneur qu’il est aujourd’hui, ce n’est certainement pas grâce à sa carrière de joueur. « Je n’avais pas de talent, je n’étais pas un très bon joueur », rigole celui qui est passé par Romanel et Espagnol Lausanne. C’est peut-être pour cette raison que très vite, le coaching a pris le dessus. A l’âge de 21 ans seulement, Benjamin Alves, alors responsable de la section juniors du club hispano-lausannois, lui propose de s’occuper des juniors E, puis des D élite, dont il a eu la charge pendant plusieurs années. « Entraîner m’a tout de suite plu. En particulier, c’est l’expérience humaine qui m’attirait, la possibilité d’offrir quelque chose à ces jeunes. Et puis tu les vois évoluer, ils restent des amis proches. Je garde encore contact avec certains d’entre eux aujourd’hui. » Dernier exemple en date : la signature de Victor Hugo Gomes pour la saison à venir, en provenance du Stade-Payerne. « C’était mon capitaine lorsque j’entraînais les B inter d’Espagnol. Ensemble, on a remporté la Coupe vaudoise », se souvient le technicien de 37 ans.
« Ma vie est au FC Venoge »
Après avoir fait ses premières armes dans le club devenu aujourd’hui Ouest Lausanne, comment se fait-il qu’Elio Da Mota ait atterri au FC Venoge ? Alors que les dirigeants du club du Gros-de-Vaud cherchaient un nouvel entraîneur pour leur seconde garniture, c’est un joueur de celle-ci, Junior Alves, qui leur a glissé le nom du coach aux origines portugaises à l’oreille. « La première fois que je suis arrivé à Penthalaz, en 2019, mon premier sentiment a été celui de la nouveauté. Moi qui avais toujours connu la région lausannoise, j’arrivais dans un club de campagne. Je dois dire que j’ai mis du temps à m’y habituer, mais aujourd’hui, ma vie est ici. »
Chez les « jaune et bleu », avec qui il entame sa septième saison au total, l’entraîneur a tout trouvé. Sa femme, d’abord, Virginie, responsable des actifs, puis le poste d’entraîneur de la première équipe, après des débuts convaincants à la tête de la « deux », surtout marqués par la pandémie. « Je pense que ce qui m’a permis d’obtenir le poste, c’est ma motivation et mon investissement. Je suis extrêmement exigeant, particulièrement avec moi-même. Mais en même temps, je fais tout pour mettre mes joueurs dans les meilleures conditions possibles. » Dernière preuve de cela, celui qui exerce la profession de plâtrier-peintre a récemment, avec l’aide de certains joueurs, rénové les vestiaires et créé une salle de musculation dans un local du terrain de Penthalaz.

« A l’époque, l’opportunité d’entraîner en 3e ligue représentait une grande chance pour moi, n’ayant connu que les Juniors, sans grande expérience chez les actifs. » Et le moins que l’on puisse dire, c’est que les débuts furent réussis. Fort d’un recrutement XXL et à la suite d’un championnat 2020-2021 annulé pour cause de Covid, le FC Venoge accédait à la 2e ligue après un exercice 2021-2022 bouclé sans avoir perdu la moindre rencontre. Lors de cette saison historique pour le club, l’équipe fanion avait notamment été portée par les talentueux Jeremy Jaquier et Albin Oyono Eto (issus de la formation du LS), Wilson Monteiro, Davide Maddalena, ou encore Lorenzo Bonanno Conti.
Pourtant, dans le modeste club des villages de Penthalaz-Penthaz-Daillens, l’argent ne coule pas à flots dans les poches des joueurs. C’est là que réside le secret d’Elio Da Mota (qui n’en est plus un pour les amateurs du football vaudois). « Ma meilleure carte de visite, ce sont mes joueurs, avoue-t-il. La preuve : nous avons été relégués cette saison, mais la plupart d’entre eux veulent rester. » Mieux encore, Jeremy Jaquier, Davide Maddalena, et Wilson Monteiro, qui avaient cédé à la tentation de rejoindre Forward-Morges, un club plus ambitieux (et avec plus de moyens), reviennent au club, un échelon plus bas. « Comme eux, beaucoup ont reçu des propositions pour jouer plus haut. Pourtant, ils restent ici, et ce n’est pas une question d’argent. » Parmi les plus fidèles soldats, on nommera Aldin Kuc, Lorenzo Bonanno Conti, Karl Kouame, Sergio Barbosa et Adrien Gross (parti cet été à Veyron-Venoge), présents depuis le début du projet, il y a cinq ans.
« Les valeurs du club me rappellent mes origines »
En dehors du football, c’est une nouvelle mentalité, voire un autre plaisir qu’a découvert celui qui est désormais père de deux filles. « Au FC Venoge, j’ai découvert une atmosphère que je ne connaissais pas. Celle d’un club familial, traditionnel, avec une ambiance extraordinaire et surtout des valeurs, qui me rappellent celles de mes origines, au Portugal. J’ai rencontré des personnes qui m’ont toujours soutenu, qui ont changé ma vie. » De là à faire du FC Venoge le club d’une vie ? « Ce sera toujours chez moi ici, mon village. Par contre, je sais que je ne pourrai pas rester éternellement entraîneur de cette équipe. C’est le foot, il y a une fin à tout. Mais après la relégation, je ne pouvais pas laisser le club comme ça. C’est aussi ma responsabilité de l’aider jusqu’au bout. »

Si le destin a semblé avoir visé juste en liant le FC Venoge à Elio Da Mota, ce dernier veut croire que cette descente s’inscrit elle aussi dans un mouvement positif. « Cela peut nous permettre de repartir plus sereinement. J’ai vécu plus de hauts que de bas ici, mais ces six derniers mois se placent dans la seconde catégorie. »
S’il sait l’accepter, l’homme fort des Cancaniers n’aime pas la défaite. Et n’a pas l’intention de s’éterniser en 3e ligue. « Le comité travaille énormément. J’ai ressenti la douleur de la relégation pour eux et pour les gens qui viennent nous soutenir à tous les matchs. Pour eux, c’est important que le club milite en 2e ligue, plus que pour ma gloire personnelle. »
En 2025-2026, la « Une » de Venoge ressemblera étrangement à l’invincible formation de 2021-22. Et au vu des arrivées déjà officielles ou futures, il se pourrait même qu’elle soit encore meilleure. De quoi faire des hommes d’Elio Da Mota une équipe attendue pour jouer les premiers rôles en championnat.
Texte et photos : Mathieu Grandchamp