Hervé Rickli n’a pas atteint tous ses buts

Hervé Rickli, comme tous les grands buteurs, sait exactement le nombre de goals qu’il a inscrit. Son palmarès personnel? 163 réussites en 1re ligue, et 34 en 2e inter, en ne comptant bien sûr que les matches officiels. Propre. L’actuel buteur de La Sarraz-Eclépens (2e inter) vient de fêter ses 34 ans, et revient pour nous sur une carrière riche en buts. Son club d’origine? Le FC Vignoble, où il a encore gardé quelques attaches. Mais son club de coeur est bien le FC Echallens, où il a vécu ses plus belles émotions, au cours de huit saisons magnifiques passées dans le Gros-de-Vaud.

Terreur des défenseurs de 1re ligue en raison de sa vitesse et de son sens du but, il a, à son compteur, une vingtaine d’apparitions en Challenge League (Bulle, puis Chiasso). Celles-ci ne lui ont pas permis d’inscrire le moindre but à ce niveau, même s’il en a inscrit en Coupe Suisse durant ces passages au deuxième échelon du football suisse. Pas de frustration chez lui, mais une lucidité empreinte de modestie. C’est bien en 1re ligue qu’il a explosé.

Après une saison 2011/2012 à 12 buts avec le FCE (1re ligue), il a décidé de quitter ce niveau et de rejoindre le FC La Sarraz, un cran en-dessous. En Gravey, il a connu une première saison dite d’adaptation (à 15 buts quand même…), avant de tout casser durant ce premier tour, comme il en a l’habitude depuis ses débuts en actifs. Alors, la montée (et le retour!) en 1re ligue, un objectif? Au vu du premier tour, oui, clairement. Et avec un buteur en feu, tout est tellement plus facile…

Hervé Rickli, terminer devant Team Vaud et La Chaux-de-Fonds, c’est un objectif réalisable?

Monter, c’est possible, bien sûr. On a battu les deux premiers, que vous venez de citer, et on est deux points derrière eux. Tout ça en ayant perdu notre dernier match à domicile, face à Lyss… On n’y croyait plus, mais Team Vaud a perdu contre Thierrens, puis fait nul à La Chaux-de-Fonds, et on est toujours là.

Et dire que vous avez changé d’entraîneur une semaine avant le début de championnat! Jean-Philippe Karlen a remplacé Stéphan Cornu quelques jours avant la réception de Team Vaud (victoire 2-1). Cela vous était-il déjà arrivé dans votre carrière?

Une semaine avant, non, jamais! C’était complètement inattendu. Mais bon, c’est le football, hein! On s’est habitué à un autre style, et on a fait vite.

Et ce n’est pas le seul changement! Votre partenaire d’attaque, Hakim Khadrouche, est parti. Et Valon Hysenaj est arrivé. Difficile à gérer?

Valon, je le connaissais de Nyon. Il était tout jeune, ça fait bizarre de le voir ici, maintenant. C’est un super-attaquant. Mais j’aimais bien Hakim aussi. Ce sont deux très bons joueurs. Et j’ai joué avec Mikael Duperret aussi. Franchement, pour moi, c’est égal. En général, je m’entends bien avec l’attaquant avec lequel je joue.

Mais vous préférez évoluer comme « deuxième attaquant », non? Avec un plus costaud qui joue en pivot et vous qui « tournez autour »…

Oui, c’est clairement ce que j’aime faire. Je suis un attaquant qui aime prendre les espaces, et faire parler ma vitesse. Enfin, la vitesse d’un gars de 34 ans (rires)! J’aime bien jouer à deux attaquants. Je suis moins à l’aise sur un côté, même si en raison de ma vitesse, pas mal d’entraîneurs me voyaient plutôt dans cette position.

Est-ce que cela explique en partie votre bonne première partie de saison? Vous êtes clairement meilleur dans le jeu cette année que l’année dernière, celle de votre arrivée, non? Et vous marquez plus, aussi!

Bon, il y a plusieurs choses. Déjà, l’an dernier, je venais d’arriver dans une nouvelle équipe, dans une nouvelle ligue. Il fallait que je m’y habitue. Là, c’est bon, j’ai assimilé cette 2e ligue inter, mais c’est vrai que je suis plus à l’aise dans le système de Jean-Philippe Karlen. L’an dernier, avec Stéphan Cornu, je jouais seul en pointe, ou sur un côté. Je le faisais pour l’équipe, attention, et je n’ai jamais râlé. Mais c’est vrai que je préfère le système actuel.

Vous en avez parlé avec Jean-Philippe Karlen?

Il sait que c’est comme ça que je préfère jouer, oui.

Vous le connaissiez, avant son arrivée?

Je le connaissais de réputation, bien sûr, mais je n’avais jamais joué contre lui, sauf erreur. Il est impressionnant, parce qu’il te donne envie de te défoncer sur le terrain. Il est très motivant, c’est un entraîneur toujours positif. Sincèrement, j’aime beaucoup son style. Il est à l’écoute, mais c’est lui le patron. Et bon, il n’y a qu’à regarder son parcours comme entraîneur: il n’a que des promotions.

Du coup, vous êtes obligé de penser à l’année prochaine, qui pourrait être celle du retour en 1re ligue, pour vous!

Oui, bon… Je me sens très bien à La Sarraz, ça c’est sûr. J’ai retrouvé dans ce club ce que j’avais à Echallens, c’est-à-dire un esprit familial. Les dirigeants sont des gens avec lesquels vous pouvez parler, boire un verre… C’est détendu, ce qui n’empêche pas de travailler sérieusement. Après, si on monte, et même si on ne monte pas d’ailleurs, il faudra voir. Il faut déjà que le club veuille me garder! J’arrive à un âge où les discussions ne sont pas les mêmes. Moi, je pense à une chose: faire un très bon deuxième tour et finir en tête du championnat.

Vous vous voyez jouer jusqu’à 38 ou 39 ans, en 3e ligue, et continuer à planter des buts de tous les côtés?

Ah non, ça c’est sûr! Je me vois beaucoup plus aller en seniors, pour me faire plaisir. Non, franchement, finir dans les ligues inférieures, ça ne me dit pas. Peut-être une saison en 2e ligue, pourquoi pas? Mais autre chose, non. Vous savez, avoir trois entraînements par semaine, ça pèse sur une vie de famille, quand vous bossez à 100% à côté. Mais attention, vous me parlez de retraite, mais je n’ai de loin pas fini! J’entends bien continuer un moment! Je suis en pleine négociation avec ma femme à ce sujet, d’ailleurs (rires)!

C’est plus dur qu’avec un président de club, non?

C’est différent (rires)! Ma femme est très compréhensive, elle sait que le foot est important pour moi. Elle me suit, et elle comprend que j’ai encore envie de profiter de mes dernières années. En fait, c’est également grâce à ma femme que j’ai pu durer aussi longtemps. J’ai de la chance avec elle, et ma famille. Si j’ai joué aussi longtemps, c’est aussi grâce à eux.

Cela fait plus de dix ans que vous tournez à plus de vingt buts par saison…

Pas exactement, vous êtes trop gentil (sourire)! J’ai toujours marqué plus de 12 ou 13 buts par saison, et j’ai parfois dépassé 20. Je dirais que j’ai toujours été concerné par le foot. J’adore ça, vraiment! Quand je me lève, j’ai une pensée pour le foot. Quand je me couche aussi, d’ailleurs. Franchement, quand je suis « en compét », si j’ose dire, je mets une grande importance dans le jeu. J’ai encore envie de marquer, et là, depuis une saison ou deux, j’ai envie de prouver que je ne suis pas fini.

Les défenseurs de 2e inter s’en sont rendus compte, comme ceux de 1re ligue avant eux… Franchement, que vous a-t-il manqué pour faire une carrière en Challenge League, avec vos statistiques si impressionnantes juste en dessous?

J’ai eu deux fois la chance d’y arriver. J’aurais pu en avoir une troisième, à Nyon, mais j’ai décidé de ne pas la saisir, puisque je suis parti lorsque nous sommes montés. Que ce soit à Bulle ou à Chiasso, il m’a manqué quelque chose. La vérité, c’est que je ne me suis jamais vraiment imposé, et que ce n’est pas la faute au hasard. Il m’a manqué quelque chose, un petit peu de tout. Dans les duels, j’étais dominé, et la vitesse, qui est une de mes armes en 1re ligue, ne passait plus forcément en Challenge League. En fait, la réponse à votre question tient en une phrase: je n’étais pas assez bon.

Mais vous n’avez pas eu de chance non plus, ne soyez pas trop sévère avec vous-même! Lorsque vous arrivez à Chiasso, c’est avec Christian Zermatten, qui vous « avait pris avec » en partant de Nyon. Et il se fait virer après quelques matches…

Oui, c’est vrai. En fait, c’est encore pire, parce que je me suis blessé après quelques matches. Et lorsque je suis revenu, « Zermi » n’était plus là. Mais bon, il y avait un entraîneur après, Raimondo Ponte. J’aurais pu m’imposer, mais ça n’a pas été le cas. Franchement, je ne vais pas chercher d’excuses. Mon plus grand regret footballistique, il n’est pas là.

Il est où?

De ne jamais avoir disputé les finales de promotion avec Echallens. Ca oui, ça me fait encore mal d’en parler. On est passé tout près plusieurs fois… J’aurais adoré contribué à offrir ça à ce club.

Dans les sujets plus positifs, il y a une compétition dans laquelle vous marquez tout le temps, c’est la Coupe Suisse. Vous l’aimez particulièrement, non?

Ah oui, j’aime bien cette compétition! Je n’y ai que des bons souvenirs. Echallens-Sion, que l’on perd d’un but. Malley-Sion, aussi, que l’on perd également d’un but. Et la saison dernière, avec La Sarraz, on arrive en 1/16e, ce qui est le meilleur résultat de l’histoire du club.

Et il y a ce 1/4 de finale, à Bâle, avec Nyon, que vous ne jouez pas…

Oui, bon… Je revenais de Chiasso, où j’étais un peu démoralisé. Je n’avais pas été titularisé. Ce n’est pas un grand souvenir personnel. Sujet suivant (rires)?

La suite de votre parcours dans le football, une fois les crampons posés? On ne vous imagine pas forcément continuer comme entraîneur, on se trompe?

Non, vous avez raison. Je me vois plus comme assistant, pour travailler peut-être le spécifique avec les attaquants, par exemple. Entraîneur principal, non, ce n’est pas pour moi.

Vous n’êtes pas un leader, pas une « grande gueule »…

C’est sûr, ce n’est pas moi qui vais parler avant les matches. J’essaie de jouer du mieux que je peux, de marquer, d’apporter la grinta. Mais un leader par la parole, clairement pas. Je ne l’ai jamais été. C’est une question de tempérament, non? Mais ça ne m’empêche pas de parler avec un jeune, s’il a envie de savoir quelque chose, de profiter d’un ou deux petits conseils…

Ca existe encore, un jeune qui demande des conseils?

Oui, il y en a. Ce n’est pas la majorité, mais il y en a.

Constatez-vous une différence entre la jeune génération actuelle et celle de vos débuts dans le football. Sans passer pour un vieil aigri si possible…

Non, ça c’est vraiment pas mon style (rires)! Non, mais c’est vrai, à l’époque, tu te faisais plus vite ramasser par les anciens. On n’allait pas jusqu’à nettoyer les chaussures, il ne faut pas exagérer, mais on portait le matériel, des choses comme ça. Aujourd’hui, à la fin de l’entraînement, tu fais un petit match et ce sont les perdants qui portent les buts. Bon, c’est pas la mort, hein! Mais les choses ont un petit peu changé. Après, je dirais que ce n’est pas forcément négatif. Aujourd’hui, un gamin qui arrive dans une équipe osera plus. Il a moins de respect, et ça a des bons comme des mauvais côtés. Mais il y a un point qui est plus problématique…

Lequel?

En fait, ils gravissent souvent les échelons trop vite aujourd’hui. Et si ça ne va pas, ils partent. Ils ne connaissent plus les six mois passés sur le banc. Ca, dans la construction d’une carrière, ce n’est pas l’idéal. Mais chez nous, à La Sarraz-Eclépens, on a de la chance. Nos jeunes sont à l’écoute, et ils sont bons. Ludovic Zwahlen, notre gardien, et Guillaume Salvi, ce sont deux bons éléments, avec de l’avenir et la bonne attitude. Jason Brunet a un petit peu moins joué, mais il a des qualités aussi. Et Dylan Martini a aussi un potentiel. Sur la longueur, ils peuvent y arriver. Après, c’est à eux de savoir. On ne va rien leur donner, il faudra qu’ils aillent le chercher.

Comme vous?

Avec le recul, je me dis que j’ai fait une jolie carrière. Mais elle n’est pas finie, je vous promets. J’ai 163 buts en 1re ligue et 34 en 2e inter. Je vous laisse imaginer le total que j’aimerais aller accrocher avant de mettre un terme à ma carrière…

180 buts en 1re ligue et 50 en 2e inter?

J’ai dit que je vous laissais imaginer, je ne vous demandais pas une réponse, mais c’est bien, je constate que vous avez encore confiance en moi (rires)!

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