Au regard de sa saison écoulée sur le banc du FC Chavornay Sports, le bilan sportif du technicien français était pourtant plutôt positif. Arrivé à l’été 2023 pour succéder à Lianel Lauper, « Abou » avait fait le job. Tous les signaux semblaient donc au vert pour que l’ancien buteur rempile pour une saison supplémentaire En Courtes-Raies.
Hormis une « décevante » septième place, largement explicable par une fin de printemps sur courant alternatif, Chavornay avait fait mieux que lors de l’exercice précédent dans à peu près tous les secteurs: Plus de points engrangés, un meilleur goal-average et même un meilleur coefficient fair-play.
L’amour vache
Mais là où les chiffres révèlent souvent une grande partie de la vérité, la réalité peut, elle, parfois, en être assez éloignée. « On m’a vendu un projet avant que j’arrive, qui s’est avéré être tout autre au fil de l’avancement de la saison » glisse Abraham Keita, le teint empreint d’une certaine amertume, qu’on ne lui connaissait pas. Car l’homme n’est pas de ceux qui s’engagent dans des challenges de courte durée, comme en témoigne son passage au FC Donneloye, qui aura duré en tout et pour tout 7 ans. « Il y avait des divergences d’opinion, comme partout, quand on arrive dans un nouveau club, il faut prendre la température, jauger. En revanche, j’ai peu à peu eu l’impression que dans la hiérarchie du club, le fait que certains joueurs aient moins de temps de jeu, ça ne passait pas. Et lorsqu’on commence à remettre en question mes choix et à mettre son nez dans mes feuilles de match, la confiance est brisée, ça ne peut plus fonctionner. » témoigne-t-il.
Et d’ajouter: « Je me suis rendu compte que quelque chose clochait, lorsqu’au fil des 6 victoires d’affilée, personne n’est venu dire un mot d’encouragement à l’équipe. Je n’ai pas fait tout juste, mais vouloir me virer après les deux défaites inaugurales…»
Alors, l’envie de ne pas poursuivre l’aventure à la tête des Corbeaux, s’est manifestée. Et elle a été réciproque : « On s’est rencontrés avec les dirigeants à quelques matchs de la fin du championnat. Je leur ai dit que j’avais envie d’arrêter et ils m’ont dit qu’ils ne comptaient pas sur moi pour la saison à venir. Néanmoins, je tiens à remercier le président, Olivier Coutaz, pour son aide dans une période difficile pour moi. » Une fin plutôt abrupte donc, pour un chapitre qui aura eu au moins le mérite de laisser un semblant de rêve dans les têtes des Chavornaysans, eux qui ont effleuré du bout des crampons des espoirs de finales qu’on aurait pensé impossibles en début de saison dernière.
Destins croisés
À quelques kilomètres de là, au Stade Municipal d’Yverdon, le FC Azzurri Yverdon, néo-promu, sauvait dans le même temps sa place en 3ème ligue, après un deuxième tour mouvementé. Exit Jason Brunet, suppléé au pied levé par Ricardo « Rico » Pinto pour une opération maintien express, le club transalpin bouclait dans une certaine agitation un championnat qui aura laissé décidément plus d’interrogations que de réponses. Entre remaniements au sein du comité et de la direction, une place fondamentale restait encore à repourvoir, sur le banc de la première équipe. « Au début, c’est l’un de mes joueurs à Chavornay, Dylan Martini, qui m’a parlé de ce projet, car il a de nombreux amis qui jouent ici. Il m’a dit « j’ai un job pour toi ! ». J’ai alors accepté de rencontrer le comité par principe, mais un peu à contrecœur. J’étais plutôt dégoûté du football des actifs, des dirigeants aux joueurs, pour être honnête. Dans ma tête, c’était certain que j’allais dire non. »
Le discours de Michael Uhlmann, Alessio Montagna et Jonathan Nicolier, qui forment depuis peu la nouvelle co-présidence à la tête d’Azzurri Yverdon, a finalement, contre toute attente, convaincu Abraham Keita de relever un nouveau défi. « J’ai tout de suite été séduit par leur transparence. On ne m’a pas fait miroiter un projet irréaliste, je sais où je vais mettre les pieds et la philosophie du club colle parfaitement à mes valeurs. J’en ai parlé un peu à ma compagne avant de faire part de ma décision, mais elle savait déjà très bien ce que j’allais faire », sourit celui qui occupe déjà le rôle de Responsable des juniors au FC Saint-Sulpice.
Un mercato séduisant
Le désormais ex-entraîneur de Chavornay n’arrive de surcroît pas seul au Stade Municipal. En plus du retour à la compétition du talentueux portier Kennedy Rodrigues, écarté des terrains près de 15 mois en raison d’une blessure au genou, Nicolas Vermot (ancien joueur de La Sarraz-Eclépens, Donneloye et Cheseaux notamment), Eros Pitronaci, son ancien coéquipier à Yverdon Sports et Dylan Martini viendront également renforcer les rangs des « azzus ». Des recrues « XXL » qui doivent venir combler les départs de Nathan Chapuis à Grandson-Tuileries, d’Enver Ibrahimovic à Rances et de Renato Provenzano, qui raccroche (au moins provisoirement) les crampons.
« Je n’ai pas fixé d’objectif, je n’aime pas vraiment faire cela. Ce qui m’importe c’est le travail que l’on fournit et la qualité du jeu que l’on propose, les résultats viendront naturellement. On doit déjà se remettre au travail et ensuite, bien sûr, on jouera chaque match pour les gagner » assure Abraham Keita, le regard tourné vers une saison qui s’annonce, d’ores et déjà, prometteuse.
Article et photos : Lucas Panchaud