Depuis 2005 et les débuts en actifs de son vaillant numéro 9, Donneloye a souvent vibré au rythme des exploits de Jérôme Thomas. L’heure est pourtant venue pour l’emblématique buteur des Oies de tirer sa révérence, après une carrière qui l’a vu tout connaître, ou presque, avec ce qui est devenu au fil des ans le club de son cœur, le club de sa vie.
Il avait pourtant déjà voulu raccrocher les crampons, Jérôme Thomas, au sortir d’une saison 2018-2019 lors de laquelle il avait joué les premiers rôles au sein du classement des buteurs de 3ème ligue avec 18 réalisations. « J’avais 32 ans, les enfants commençaient à grandir, à aller à l’école. On faisait des activités le week-end et ça ne concordait pas toujours avec le foot. J’ai de la chance d’avoir une femme très conciliante, qui a fait beaucoup de sacrifices, mais je ne pouvais pas trop en demander non plus. Surtout que je suis du genre à m’investir à fond, ou sinon je préfère ne pas me lancer. J’ai vraiment de la peine à faire les choses à moitié. M’entraîner 1 fois sur 2, ça n’est pas vraiment ma vision du foot », se rappelle l’habitant de Cronay.
Le Covid a finalement eu raison de son arrêt, décidé un peu à contrecœur, qui n’aura duré que l’espace d’une saison et demie environ. « Je suis d’abord revenu donner un coup de main lorsqu’Abou (ndlr : Abraham Keita) était encore l’entraîneur de la Une. J’ai toujours eu un très bon feeling avec lui alors je n’ai pas hésité lorsqu’il m’a sollicité. Ça s’est ensuite enchaîné, dès que j’ai su que Yannick (ndlr : Bovay) et Gaël (ndlr : Rochat) reprenaient, c’était normal pour moi de poursuivre avec eux.
« Une très bonne expérience pour tout le monde »
La suite est connue, une promotion fêtée en différé au printemps passé et qui aura connu comme épilogue une relégation, presque inéluctable, dans la foulée. Un travers qui ronge Donneloye depuis des années et qui s’inscrit de plus en plus dans l’ADN du club Nord-vaudois, tant ni la 2ème ligue, ni la 3ème ne semblent réellement seoir aux Oies. « Effectivement je pense que cette dernière promotion est survenue peut-être une année trop tôt », s’accorde celui qui a grandi entre Yverdon et Ursins. Mais il nuance : « Ça restera malgré tout une très bonne expérience pour tout le monde. Pour les joueurs, pour les coachs ».
Mais évidemment, la carrière du fantastique buteur ne s’est, heureusement pour le FC Donneloye, pas limitée à ces deux dernières saisons remplies de hauts et de bas. Il fut aussi un temps, un peu plus lointain, mais toujours bien présent dans les mémoires, où son duo avec un certain Hervé Vallotton faisait littéralement régner la terreur dans les défenses du canton.
Son regard s’illumine : « Hervé ? C’est un ami de longue date. On s’était connu en A inter à Yverdon, donc on avait déjà passablement appris à se connaître avant d’évoluer ensemble à Donneloye. Ce qui est drôle, c’est qu’on avait des qualités très complémentaires. Il allait à mille à l’heure ! Il était tellement rapide que parfois je devais lui crier « Attend, j’arrive ! » pour qu’il puisse me passer le ballon. À un certain moment, on se trouvait les yeux fermés » relate Jérôme Thomas, le sourire aux lèvres. Le tandem a fait des étincelles, parfois même des feux d’artifice durant la période de 2007 à 2016, qui les a vus fouler conjointement la pelouse du Stade Dany Gavillet.
Un « âge d’or » qui avait notamment permis aux oies de fêter une promotion en 2ème ligue en 2012, suivie d’un maintien à cet échelon, le seul de ces 20 dernières années. « C’était vraiment une belle période, et j’ai eu la chance de pouvoir la vivre avec ces joueurs et avec ce club. J’en garde de très jolis souvenirs : la cohésion du groupe, l’engouement des supporters qui étaient là à chaque match, les soirées d’équipe. C’était magique », se souvient celui qui possède une entreprise de ferblanterie.
La fierté des siens
Autre évènement qui lie Jérôme Thomas à « son » FC Donneloye : la participation historique à la Coupe de Suisse en 2016, acquise grâce au coefficient fair-play, lors d’une défaite-fleuve face au FC Le Mont (0-14), alors pensionnaire de Challenge League. Il part au grand galop chercher le maillot de cette journée mémorable, qu’il a conservé bien précieusement au fond d’une armoire.
À l’heure des récits, le capitaine d’alors préfère garder les bons moments en mémoire « Le résultat est anecdotique, je crois qu’après une demi-heure il y avait déjà 4 ou 5 à zéro. Mais c’était une super expérience de jouer une équipe vaudoise, de voir ce monde autour du terrain et de pouvoir se frotter à des joueurs de ce niveau. Je suis assez fier en tant que joueur d’avoir pu participer à cette compétition. Même si c’est Francois Marque qui s’occupait de me tenir, donc autant vous dire que je n’ai pas beaucoup vu le ballon ! » plaisante-t-il.
L’ère Jérôme Thomas a donc indubitablement marqué l’histoire du « FCD » et son départ aux « +30 » laissera forcément derrière lui un vide difficile à combler. « Aujourd’hui j’ai bientôt 38 ans, j’ai beaucoup donné physiquement. Déjà l’an passé malgré la promotion je n’étais pas forcément sûr de vouloir continuer. Là je sens que c’est le bon moment de rejoindre mes copains aux Seniors, moi, j’ai fait mon temps. » Souligne le jeune retraité du football des actifs.
Mais le trentenaire n’oublie pas de rendre hommage à ceux qu’il a croisés sur sa route et qui l’ont marqué. « Lors de mon passage à Echallens, j’ai évolué sous la houlette de Benoît Pythoud. C’était vraiment un coach à part, très méticuleux, qui ne laissait rien au hasard. On avait un feed-back personnel après chaque match, pour moi c’était un autre monde! Quand on a connu ce niveau-là, c’est parfois dur de revenir à un certain « amateurisme », mais l’un et l’autre ont leurs bons comme leurs mauvais côtés », explique-t-il.
« Il y a de bons jeunes qui incarnent parfaitement les valeurs et l’avenir du club. Comme Flavien Allard ou Joé Casella, qui sont en plus de très bons gars et d’excellents joueurs de foot. J’aimerais vraiment qu’ils réussissent à implanter le club durablement en 2ème ligue. Ça dépendra d’eux, de l’implication et de la motivation qu’ils y mettront. Mais je crois en eux, ils ont les moyens de le faire », termine Jérôme Thomas.
Sur l’autel de son amour pour le ballon rond, Jérôme Thomas n’a jamais, au grand jamais, sacrifié sa passion du maillot. Pas une fois n’a-t-il triché, pas une fois n’a-t-il rechigné à tout donner sur le terrain. Et c’est pour ça qu’on respecte et qu’on aime tant les joueurs de sa trempe. Faits du matériau dont sont faits les plus grands, de plus en plus noble et rare. Si Jérôme Thomas et FC Donneloye rimeront toujours, c’est, finalement, tout sauf un hasard.
Rédacteur: Lucas Panchaud
Photographe: Lucas Panchaud